TVA du livre numérique, où en est-on ?

La Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) a publié un arrêt déclaratif, le 5 mars dernier, indiquant que la France et le Luxembourg ne respectaient pas les conditions concurrentielles européennes en terme de vente de produits numériques, car ils appliquent une TVA à taux réduit pour les livres numériques.

Contexte et avis de la CJUE

En France, les livres numériques profitent du même taux de TVA réduit (5,5%) que les livres imprimés dans le but d'assurer l'égalité des différents modes de distribution des livres. Or, pour la CJUE, le livre numérique est avant tout considéré comme un ensemble de données fournies grâce à un fichier dématérialisé. Le taux réduit de TVA est indiqué, lui, pour la fourniture de livres sur support physique.

Cet avis de la CJUE n'est pour l'instant que déclaratif et ne fait pas office d'injonction à remonter les taux de TVA appliqués. Néanmoins, cette annonce a provoqué de vives réactions de protestation au sein du gouvernement et de l'ensemble des professionnels du livre. Les risques mis en avant sont multiples : les éditeurs dénoncent la possibilité que le livre numérique soit vendu plus cher que le livre papier contrairement à la tendance actuelle ; les auteurs, dont les revenus sont calculés à partir du prix de vente hors taxe, craignent, eux, de voir leurs revenus diminués si la hausse de la TVA n'est pas répercutée sur les prix.

Réactions

Une déclaration conjointe de Michel Sapin, Ministre des finances et des comptes publics, Fleur Pellerin, Ministre de la culture et de la communication, Harlem Désir, Secrétaire d’État chargé des affaires européennes, Christian Eckert, Secrétaire d’État chargé du budget, et Axelle Lemaire, Secrétaire d’État chargée du numérique, appelle la CJUE à faire « des propositions dans le cadre de la stratégie pour le marché unique numérique pour introduire dans le droit européen un principe de neutralité permettant l'application du taux réduit pour tous les livres, quel que soit leur support. »

Le Syndicat National de l'Édition (SNE) a, de son côté, lancé une campagne #ThatIsNotABook VS #ThatIsABook (#CeciEstUnLivre) pour défendre le taux de TVA réduit du livre numérique. Le Syndicat de la Librairie Française (SLF) s'est associé à cette campagne et rappelle, sur son site, que le contenu d'une œuvre doit prévaloir sur son contenant. Le Conseil Permanent des Écrivains (CPE) a déclaré, dans la même optique qu' « une TVA réduite pour le livre numérique constitue pour les auteurs une condition essentielle d’un développement du marché équilibré pour tous les acteurs de la chaîne » (source : site de la Société des Gens de Lettres).

Le débat sur les DRM relancé ?

Parallèlement, ces problématiques de TVA ont relancé, en France, le débat concernant l'utilisation de DRM (Digital Rights Management) pour le livre numérique. La comparaison d'un livre papier et d'un livre numérique suppose, pour certains, que l'accès au livre doit rester libre (et donc sans DRM). Or, les DRM sont appliqués en vue d'empêcher le partage (et par là, le piratage) des fichiers numériques. L'APRIL, association de promotion et de défense des logiciels libres, a ainsi réagi à la campagne lancée par le SNE, rappelant que la distinction doit être faite entre un livre numérique avec DRM et un livre numérique sans DRM car le lecteur n'a pas les mêmes droits et ni le même accès que pour un livre imprimé.